Apocalypse 10, 8-11, situé dans la vision mystique de l’Apôtre Jean, explore le symbolisme du petit livre que Jean est invité à manger. Ce passage, chargé de symboles, invite le lecteur à réfléchir sur la nature prophétique de la Parole de Dieu, sa douceur initiale et son amertume dans l’annonce du message. Ce texte se déploie dans un contexte où le mystère divin s’accomplit et où le témoignage chrétien est central.
1. Le petit livre : une Parole à assimiler profondément
« Prends le petit livre et mange-le ; il sera amer à tes entrailles, mais dans ta bouche, il sera doux comme du miel » (Ap 10, 9).
La vision du petit livre confié à Jean symbolise l’appel à s’approprier intimement la Parole de Dieu. Comme l’explique Saint Jérôme : « La Parole doit être consommée, intégrée, pour transformer l’homme intérieur. » Ce geste de manger le livre illustre la profondeur de l’engagement à vivre la Parole.
Dans un premier temps, la Parole paraît douce comme le miel : elle procure réconfort, joie et une communion profonde avec Dieu. Mais cette douceur initiale se confronte à l’amertume de la mission prophétique. L’annonce de la vérité divine implique souvent le rejet, la persécution et le fardeau de porter un message qui dérange. La Parole devient ainsi un moyen de sanctification, car elle exige à la fois fidélité et courage face aux épreuves.
2. La mission prophétique : témoigner en toutes circonstances
« Il me fut dit : Il te faut prophétiser de nouveau à l’adresse de nombreux peuples, nations, langues et rois » (Ap 10, 11).
L’invitation à prophétiser souligne l’universalité du message chrétien. Jean, en mangeant le livre, devient le dépositaire d’une mission urgente et universelle. Selon Hans Urs von Balthasar : « La vocation prophétique n’est jamais une position de confort ; elle engage tout l’être dans le plan salvifique de Dieu. »
Dans le contexte de l’Église, cette mission concerne chaque chrétien. L’Église, par sa nature prophétique, est appelée à annoncer l’Évangile avec audace, même au cœur des défis. L’amertume mentionnée dans le texte reflète les tensions et les luttes liées à ce témoignage : rester fidèle à l’Évangile dans un monde souvent hostile nécessite une foi inébranlable. Le prophète, soutenu par l’Esprit, sait que son message est porteur de vie, même si ses auditeurs résistent.
3. L’amertume : une épreuve pour purifier le témoignage
L’amertume qui envahit les entrailles de Jean après avoir mangé le livre symbolise les épreuves et les résistances rencontrées dans la proclamation de la Parole. Cette expérience rappelle que l’appel à témoigner de Dieu n’est pas exempt de souffrance. Comme le souligne le Pape Benoît XVI dans Verbum Domini : « Le témoignage de la Parole est souvent marqué par la croix, mais c’est dans cette croix que se manifeste le véritable amour. »
Cette amertume ne doit pas décourager le prophète, mais plutôt l’unir au Christ, qui a lui-même porté le poids du rejet pour accomplir la volonté de son Père. Elle invite aussi à une introspection : chaque épreuve est une opportunité de purifier ses intentions et de renforcer sa confiance en Dieu. Le chrétien est appelé à marcher sur les traces du Christ, conscient que la vérité qu’il annonce porte des fruits éternels.
4. Le mystère de Dieu accompli : espérance et mission
Ce passage s’inscrit dans une dynamique eschatologique. L’appel à Jean à prophétiser « de nouveau » signale que le mystère de Dieu, bien qu’en voie d’accomplissement, requiert encore la fidélité des croyants. Ce mystère, révélé pleinement en Jésus-Christ, est une source d’espérance pour les chrétiens : il rappelle que l’histoire humaine est entre les mains de Dieu.
Saint Augustin écrivait : « L’achèvement du mystère divin ne supprime pas notre engagement, mais le rend plus urgent. » C’est cette tension entre l’espérance et la mission qui définit le rôle du chrétien dans le monde. La Parole de Dieu, douce et amère à la fois, devient un guide pour traverser les épreuves avec la certitude que la victoire finale appartient à l’Agneau.
Conclusion
Apocalypse 10, 8-11 offre une méditation profonde sur la Parole de Dieu, qui transforme celui qui l’accueille et le pousse à témoigner de manière prophétique. À travers le symbole du petit livre, ce passage révèle les dimensions essentielles de la mission chrétienne : la joie de recevoir la Parole, l’amertume des épreuves et l’espérance de l’accomplissement du dessein divin.
Dans un monde souvent en quête de sens, ce texte rappelle que chaque chrétien est invité à être un témoin fidèle et courageux de l’amour de Dieu. Qu’il soit doux ou amer, le message de l’Évangile est porteur de vie et de salut pour tous ceux qui l’accueillent avec foi. « Il te faut prophétiser de nouveau » (Ap 10, 11) : cette injonction s’adresse encore aujourd’hui à l’Église, appelée à illuminer les nations par la vérité du Christ.
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